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Quand la norme s'invite dans nos assiettes...

La douceur de l’automne s’apprête à nous quitter pour faire place à l’hiver avec son manteau blanc et ses soirées auprès du feu. Cette transition saisonnière est pour moi la promesse culinaire conviviale et chaleureuse de …… La raclette !  

 

Ce plat traditionnel Suisse, a traversé les frontières et les siècles pour s’inviter sur nos tables, se prêtant à toutes les variations. Mais alors que la popularité de la raclette ne faiblit pas, une nouvelle tendance émerge : l’intronisation de la norme dans la préparation de ce plat convivial.

 

Historiquement, la raclette se veut simple : du fromage fondu raclé sur des pommes de terre, accompagné de charcuterie et de quelques légumes. Cependant, à mesure que la raclette a gagné nos foyers, les puristes ont érigé des règles autour de sa préparation et de sa dégustation. Le choix du fromage, la méthode de fonte, la variété des accompagnements. 

 

Le fromage, élément central de la raclette, doit être, selon les afficionados, un fromage spécifique, nature, avec sa croûte, de préférence au lait cru et d’origine contrôlée. Oubliez les alternatives allégées ou les variantes trop exotiques fumées, au poivre. La tradition réclame le respect des saveurs originelles. Quant au service, il se doit d’être effectué à l’aide d’un appareil à raclette qui permet de fondre le fromage de façon uniforme et de le racler habilement sur les assiettes des convives. Oubliez l’appareil électrique avec les petits caquelons et les spatules en bois. 

 

Les accompagnements, autrefois limités à des pommes de terre, des oignons et des cornichons, sont désormais sujets à débat. Certains puristes ne jurent que par la simplicité, tandis que d’autres se permettent des fantaisies, intégrant des légumes variés, des viandes de choix, des champignons et même des fruits de mer.  

Cette tendance à la normalisation de la raclette ne s’arrête pas à la sélection des ingrédients ou au processus de cuisson. Elle s’étend également au contexte dans lequel le plat est consommé. Une véritable raclette se doit d’être partagée entre amis ou en famille, autour d’une table conviviale, dans une atmosphère de bonhomie et de chaleur humaine en hiver. La raclette solo début mai, on n’oublie ! 

 

Alors il est aisé d’imaginer que lorsque nous décidons de nous retrouver autour d’une bonne raclette, les visions culinaires de nos convives sont très importantes.  

 

Entre ceux qui sont très respectueux de la recette de base et refusent les déclinaisons. Ceux qui se fichent de la saison, des formes de fromage, qui peuvent même la déguster avec du ketchup, mais qui épluchent les pommes de terre, il y a des limites quand même. Encore ceux qui, tout végétarien qu’ils sont, ont aussi envie de partager ce repas avec d’autres qui s’accommode de la tradition ou de la créativité.  

 

La raclette est plus qu’un repas, elle est une expérience concrète de la confrontation de nos prismes culinaires. La capacité de chacun à accepter la vision de l’autre, à entrer dans l’univers de l’autre, va déterminer l’ambiance du repas. Les puristes ne risquent rien à tenter des folies. Ils embrasseront la norme à la prochaine soirée en se répétant qu’heureusement qu’il subsiste des gardiens de la tradition. Inversement, les plus extravagants pourront apprécier les saveurs originelles tout en restant des inconditionnels de la déclinaison fromagère. 

 

Rejoindre le monde de l’autre, de notre enfant, notre parent, d’un ami, un collègue ou d’un parfait inconnu est très intéressant car nous pouvons comprendre ses réactions et élargir notre petit monde. 

 

Selon moi, la raclette très Palo Altienne dans la façon qu’elle a de nous faire comprendre qu’il n’y a pas une vérité mais des vérités. Et que si nous restons emprisonnés dans nos préjugés, nous ne pouvons pas aller à la rencontre de l’autre. 

 

La raclette, comme tout autre fruit de la tradition, vit et se transforme avec ses adeptes. Respecter la tradition ne signifie pas rejeter la nouveauté, mais plutôt intégrer les innovations tout en préservant son esprit. 

Alors que l’hiver s’installe et que les raclettes vont se multiplier, pourrions nous transposer cette réflexion à divers domaines de nos vies ? Nos principes éducatifs, notre couple, notre rapport au travail. Je vous laisse méditer …. 

 

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